Bruno Latour a proposé de qualifier de « nouveau régime climatique » le basculement récent dans l’ère de l’Anthropocène. De simple décor impassible aux affaires humaines, le climat terrestre se serait imposé comme un agent politique à part entière. Les historiens J.-B. Fressoz et F. Locher ont contesté la radicalité de la coupure entre « l’ancien » et le « nouveau » régime climatique au nom de la longue durée des formes modernes de réflexivité environnementale. Il s'agira ici de repartir de ce débat pour s’intéresser à la « notion indivise » (Canguilhem) de 'climat' et aux rapports qu’elle a pu décliner, tout au long de la modernité occidentale, avec des modes spécifiques de gouvernement des hommes et des milieux. Si les savoirs autour des climats de la politique ont varié selon les échelles adoptées (les climats locaux versus le climat global) et les grammaires d’action (l’« influence » exercée par les climats versus l’« impact » anthropique), de telles variations témoignent d’une même « idéologie » climatique (M. Hulme) dont bon nombre de présupposés mériteraient aujourd’hui d'être questionnés en profondeur.

Louis Carré est chercheur qualifié du FNRS en philosophie à l'Université de Namur. Il co-dirige le centre Arcadie (Anthropocène, histoire, utopies).

Modération : Marc-Antoine Sabaté, ULB - CTP

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